Chroniques en milieux inhospitaliers

Fin 2006, la carrière footballistique d’ Harry Steed se brisait en même temps que son tibia et son péroné droit sous le tacle appuyé d’un footballeur maladroit de Reterre-Fontanières. Je ne sais ce qu’ il en est actuellement mais, à l ’époque, les footballeurs  de cette petite localité n’ avaient pas la réputation d’ être des poètes.

Quelque onze ans après ce drame, dans un élan de mimétisme inutile, mon jeune pote se brisaient les mêmes os tout en faisant preuve d’ originalité puisqu ’il faisait ça côté gauche. Cela m ’a renvoyé à ces chroniques qui vont apparaître maintenant et se décliner en cinq étapes. Il faut dire qu’ à l’ époque, pour une telle fracture, on restait pas loin d’une semaine à l’ hosto, alors que maintenant, deux jours après l’ opération, tu es renvoyé dans tes foyers. Sous peu, on t ’opérera sur place et tu rentreras en béquillant !

 

                                                  L’ hôpital (1)

Dimanche 3 Décembre.

 

Cette double fracture aura eu un mérite,

Celui de me faire découvrir le milieu hospitalier du troisième millénaire.

Milieu qui, sur le peu que j’ en ai vu en cinq jours,

N’a d’ hospitalier que le nom…

Mais, revenons quelques pas en arrière

(Oui, je sais faire cela, même avec un déambulateur).

Ce match a failli ne pas se jouer !

Figurez-vous qu’ à quatorze heures, sur la place de Peyrat-la-Nonière

Nous n’ étions que cinq !

Et étrangement, moi qui adore jouer (Je n ’arrive pas encore à dire “j’adorais”),

Je me voyais déjà rentrer avec plaisir à la maison,

Entre autre pour finir ces bilans semestriels que notre direction nous demande de rendre au bout de trois mois !… (Comprenne qui pourra disait Bobby Lapointe)

(Je n’ avais pas forcément l’ intention de les rendre, mais les finir oui),

Quand d’ autres joueurs se sont enfin signalés,

Et bien qu’ à dix, nous l’ avons joué ce match.

Détail “amusant” s’ il en est,

Dans les vestiaires, juste avant le match,

J’avais annoncé à mes coéquipiers que c’ était le dernier match que je disputais en entier.

“Amusant”, dans la mesure où je n’ ai pas pu le terminer…

C’ est à se demander si je ne lui ai pas tendu la jambe à ce gars-là…

Pas à cause des bilans, croyez-moi,

Mais seulement dans un acte inconscient…

Enfin… On ne le saura jamais.

Vous m’auriez vu, allongé au milieu du terrain

En attendant les pompiers d’ Evaux-les-Bains.

Oui, en Creuse il n’y a pas la mer,

Mais il y a Evaux-les-Bains et ses termes,

Là même où j’ avais vu cet été Canned Heat et Ten Years After,

Pour un concert qui fera titrer au journal la Montagne du lendemain :

“Woodstock en Creuse-2500 personnes”.

Donc je suis resté là, allongé sous la pluie,

Protégé par quelques couvertures,

Entouré par les joueurs des deux équipes

Et les nombreux spectateurs présents pour ce match,

Une quinzaine de personnes environ,

En fumant la cigarette que j’ avais réclamée à mon président.

Un dirigeant adverse m’avait bien proposé :

“Tu veux une gitane, c’est de la bonne cigarette ça…”

Mais je lui ai répondu que j’étais bien trop délicat pour fumer des brunes…

Je me disais : “Que pensent-elles ces deux jeunes filles

En voyant ce vieillard brisé en pleine gloire ?”

Et tout ce que je pouvais dire à ces gens qui s’ inquiétaient de ma douleur,

C ’était : “C’est bien triste de terminer sa carrière comme ça”.

Mais, ne sombrons pas dans le mélo,

Montons dans le véhicule des pompiers enfin arrivés,

Et filons à toute allure au rythme des pim pom pim pom

Vers l ’hôpital de Guéret, via Chambon, Lussat et Gouzon.

Hôpital que je connais un peu,

Mais seulement en tant que visiteur valide.

A suivre….

Harry Steed (6 Décembre 2006-extrait de « Chroniques en milieux inhospitaliers)

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