Le blues du confiné (9-a)

On pourrait se demander pourquoi j’écris sans intérêt… et pourquoi je partage ça ici. Je n’ai pas vraiment d’explications logiques et celles-ci peuvent varier selon l’humeur du moment. Alors, pourquoi me direz-vous ? Vous ? Oui, je sais, je dis vous et écris comme si je m’adressais à un interlocuteur potentiel qui n’existe peut-être pas mais, qu’importe. Á force d’avancer seul, qui plus est en cette période de confinement, j’ai pris l’habitude de parler seul, donc d’écrire de la même façon. Ce n’est pas pour rien si j’ai une rubrique qui se nomme « dialogues imaginaires ». Il y a peu quelqu’un évoquait la schizophrénie possible en ce qui me concerne… Pourquoi pas ?… Même s’il me semble être lucide face à certaines situations et si cette schizophrénie n’est peut-être qu’un trouble d’apparat. Qui sait ?… Pourquoi écrire quand il suffit parfois de copier/coller pour exprimer son ressenti ? Je n’y arrive pas, je n’y arrive plus. Besoin de me soulager du trop-plein.

Le problème est, et je ne sais si vous connaissez cela, que je ne parviens pas ou pratiquement jamais, surtout ces derniers temps à ne pas penser (autant que je me souvienne, ces deniers mois, il n’y a que deux situations qui me permettent de débrancher : quand je suis aux chiottes et fais des « sudoku » et pendant certains concerts de Jamait) et je suis sans cesse submergé par ces cogitations. Á croire que le bouton pause de mon disque dur cérébral est pété. Le pire c’est le soir au coucher. Si dans la journée, je peux me soulager quelque peu en écrivant ce qui dégouline de mes entrailles, le soir, dès que j’ai les yeux fermés, ce sont des flots de « réflexions » qui déferlent tels des tsunamis où se mêlent souvenirs, espoirs mirages et frustrations et je manque par trop, à cette heure-là, de courage pour rallumer et noter toutes ces divagations, juste pour apaiser la douleur. Parfois je hurle de l’intérieur : « Fiche-moi la paix » en tentant de me fabriquer un de ces rêves utopiques, artificiels et béats qui m’emmènerait loin de ces rivages tumultueux. Si au moins je pouvais enregistrer ! Mais il semble que certains abus passés n’aient détruit le bouton « record », à moins que ledit bouton ne se soit dissous dans ces produits illicites…

Á cet instant, je pourrais tout aussi bien m’arrêter tant je sais que je risque d’écrire des choses déjà répétées, étant dans cette phase ritournelle qui tourne parfois à l’obsession. Des choses où seuls quelques mots et virgules peuvent changer mais, je n’y parviens pas. Un ami très cher me disait : « Faut que ça me pisse du bras » ! Et dans ma tête, la première fois, je me suis dit : « ouais, plutôt de la main », alors que la main, sans l’aide du bras… Et puis si l’on y réfléchit encore un peu plus, le bras, sans le cerveau… Et dans mon cas, je devrais même dire, sans le cœur car, même si parfois ça passe par le cerveau, bien des fois, et en particulier les soirs évoqués, ça saute l’étape cerveau, directement du cœur au cœur comme disait Léotard. Pas pour rien que l’on dit parfois : « je pleure sans raison ». C’est sans doute de là que vient ce blues du moment. Seul, sans personne avec qui échanger les yeux dans les yeux, pas de bouche à manger, ni de délires ou de larmes à partager.

Harry Steed (Avril 2020 – extrait de « L’avenir est en doute »)

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